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Les traverses en chêne imbibées de fongicide et le « tac-tac » qui montait aux oreilles des voyageurs assoupis, c’est terminé. La modernisation de la voie ferrée est en marche. Le train d’antan s’éloigne.

Fini le tac-tac…

Article de SUD OUEST du 14 octobre 2010
Pyrénées-Atlantiques, Pau

Le calcul n’a rien de bien compliqué. Un rail de chemin de fer « traditionnel » fait 18 m de long. Sur 35 km de voie, il en faut un peu moins de 2 000 reliés, les uns aux autres, par des joints métalliques. À chaque fois que les essieux d’un wagon (boggie) roulent sur l’un de ces joints — près de 2 000 fois, donc —, il monte ainsi aux oreilles des voyageurs comme un battement de cœur, une pulsation tintante et régulière qui fait « tac-tac »… De quoi bercer l’usager gagné par le sommeil ou, au contraire, le tenir en éveil. C’est selon. Mais pour les habitués de la voie ferrée qui relie Pau à Oloron, ce ne sera bientôt plus qu’un souvenir.

En janvier 2011, le chantier de la modernisation de la ligne, lancé début juillet, sera arrivé à son terme. Et plus rien ne viendra résonner sous les lourdes roues des trains express régionaux (TER). De la gare d’Oloron au pont métallique polygonal qui passe sur le gave, peu avant la gare de Pau, on ne distinguera plus qu’un seul rail, long de 35 km.

Un rail unique dont les tronçons sont désormais soudés en continu, in situ, à raison de 600 à 800 mètres linéaires par jour sans l’ombre d’un nuage. Faute d’intempéries majeures, « nous sommes dans les délais », assure Nicolas Guyot en charge de la conduite des opérations pour RFF.

RN 134 : passage à niveau en sursis

Le rail ne croisera plus la RN 134, à terme, entre Pau et Oloron. Réseau Ferré de France a en effet classé le passage à niveau de Herrère, petite commune également connue des automobilistes pour son radar automatique, dans la catégorie des « préoccupants ». C’est-à-dire de ceux « qui présentent un risque particulier », explique Nicolas Guyot, chef d’opération des travaux de rénovation de la ligne Pau-Oloron (en cours). L’État a donc décidé de supprimer ce passage à niveau en créant un pont. Les usagers de la RN 134 passeront sur le pont, les voyageurs du rail et le fret en dessous. L’échéance semble fixée à deux ans. En tout cas, l’étude préalable est en cours, indique Nicolas Guyot. « Ce sera un projet sous maîtrise d’ouvrage de l’État. » Le moyen de sécuriser le trafic, à cet endroit précis et problématique, sur une route nationale très empruntée. Mais le confort s’est d’ores et déjà amélioré à Herrère, pour les automobilistes et deux-roues qui y passent. Réseau Ferré de France a pour mission de refaire le platelage de chacun des 27 passages du parcours (26 sont placés sur de petites routes). Le platelage, c’est l’endroit précis où le rail croise la route. Souvent, les « joints » sont en bois. Ce qui génère des secousses au volant. RFF les remplace par du caoutchouc beaucoup plus souple. À Herrère, c’est déjà le cas.

170 salariés sont aujourd’hui mobilisés sur un chantier (Colas Rail, Guintoli, Systra, Inexia…) de 35 millions d’euros (1 million du kilomètre) aux multiples facettes. Les tabliers neufs de deux ponts ont été refaits, ces derniers jours, au niveau de Gan. La signalisation lumineuse démontée, pour être remontée, les fossés creusés. Il a également fallu traiter 100 000 tonnes de ballast (25 % de l’existant a pu être réutilisé), ce gros gravier rougeâtre venu de carrières des Deux-Sèvres et de Saint-Étienne-de-Baïgorry sur lequel les traverses viennent reposer.

Environ 170 personnes sont mobilisées, en ce moment, sur les différents
sites en chantier comme ici à Gan. (ph. Thierry Suire)

Dépasser 80 km/heure…

Des traverses qui constituent, comme le rail, la nouveauté. Le temps des épaisses poutres en chêne est révolu. Désormais, les hommes de l’art posent des traverses en béton, mieux armé pour faire face aux outrages du temps. Quoique le traitement infligé aux traverses de chemin de fer d’antan leur assurait une belle « carrière ». Chacune était en effet trempée dans un bain de puissants produits chimiques leur évitant de pourrir. Des polluants que la pluie s’est chargée, au fil du temps, de distiller dans la nature. Longtemps, ces traverses en bois désaffectées ont été récupérées par des particuliers pour en faire des murets de jardin ou du bois de chauffage. Avec les conséquences sur la santé qu’on imagine. C’est aujourd’hui proscrit.

Les 50 000 unités prélevées entre Pau et Oloron seront détruites après un brin de toilette. Pour les remplacer, il faut non pas 50 000 mais 60 000 traverses en béton. Chaque pièce porte un numéro qui assure sa traçabilité. Qu’est-ce que ça va changer pour l’usager ? Des trains moins bruyants, qui ne seront plus contraints de lever le pied par endroits en raison de l’état de vétusté de la voie mais capables de dépasser les 80 km/h… De quoi gagner quelques minutes de trajet entre Pau et Oloron. Mais le « tac-tac » d’antan, c’est fini.

OLORON, JEUDI 7 OCTOBRE 2010. TRAVAUX SUR LA LIGNE SNCF PAU – OLORON.

Des platelages avec des éléments en caoutchouc durci
équipent désormais les passages à niveau. (ph. Thierry Suire)

Le chiffre du jour : 150 000

C’est à peu près le nombre de passagers enregistrés sur la ligne ferroviaire Pau-Oloron, l’an dernier. Les usagers disposaient de huit aller et retour quotidiens. La remise à neuf des installations pourrait permettre de passer à neuf, avec accroissement de la vitesse des trains. En attendant la reprise du trafic, un service de cars est assuré.

 

Des photos du travail

Par Patrick Marconi du CRÉLOC

Éléments de platelages prêts à équiper le passage à niveau de Gan
une sorte de mousse de caoutchouc durci, delon Inexia.

Pour cela on est obligé de décaisser pour retrouver le niveau du passage
et éviter le dos d’âne.

Pour aller voir saint Grat à Oloron, on gratte.

On peut déjà voir le raccord de la voie ferrée.

 

Vue en direction Saragosse ; c’est net et propre.

 

 
Une étude technique

Notre confrère Robert Claraco présente ainsi un rapport de 35 pages sur les passages à niveau :

Préalable

Le CRÉLOC qui soutient la remise sur rail des services de transports publics de voyageurs et de marchandises sur l’itinéraire Oloron-Sainte-Marie a Canfranc, est légitimement reconnu dans cette action par les institutions elles-mêmes, puisqu’en 2008, le Conseil d’État a jugé l’une de ses requêtes recevables.

En outre, lors de cette action, Réseau Ferré de France a sous-tendu sa défense en confirmant que la ligne qui est régie par une convention internationale n’était pas fermée à tout trafic, mais que les circulations étaient simplement suspendues.

Cette position est intellectuellement équivoque car matériellement RFF a multiplié les autorisations d’emprunt routier de cette infrastructure.

Le dernier en date est situé sur la déviation de Bedous, au nord de l’agglomération, où une brèche importante a été réalisée dans le talus sans mettre en concordance le dénivelé pour dégager le gabarit routier lors de la mise en place d’un passage supérieur ferroviaire.

En outre, bien qu’ayant assuré le Conseil Régional d’Aquitaine, qu’une simple remise en état de l’infrastructure, par régénération complète de l’installation, entre Oloron-Sainte-Marie et Bedous, était possible, RFF prétexte a posteriori, d’une directive ministérielle sur les passages à niveau, pour remettre le chantier déjà budgétisé en cause.

C’est dans ce contexte que le CRELOC demande un avis, pour soutenir la faisabilité de reprise immédiate du trafic des trains TER sur le segment Oloron-Sainte-Marie–Bedous et poursuivre le projet sans délai pour réhabiliter la ligne jusqu’à Canfranc.

Le document à télécharger (3,5 Mo) >

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